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02/07/07



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ENTRETIEN AVEC MARTIAL FOUGERON (MON FILS A MOI)
L'HISTOIRE

Cette histoire n'est pas la mienne. Mais, j'ai toujours été très sensible aux histoires
d'amour excessif que l'on a pu me raconter, aux histoires de mères dévorantes, de relations qui dérapent à force d'autorité maternelle démesurée. Ces débordements découlent d'ailleurs souvent d'un bon sentiment "j'aime mon enfant", "je fais tout pour lui", "il est toute ma vie". Certaines de ces mères sont parfois violentes physiquement avec leur enfant quand il n'atteint pas les objectifs qu'elles ont elles-mêmes fixés. Avec Florence Eliakim, co-scénariste, nous avons remplacé ces agressions physiques par une violence plus discrète, au départ moins palpable, une violence psychologique nimbée d'amour, difficile à décrypter pour un enfant.


UN DRAME PSYCHOLOGIQUE

Le film raconte le lien unique et fort qui unit la mère et Julien. Cette relation est particulière, la mère est une femme omnipotente, aux comportements troubles, l'adolescent est constamment conditionné par une éducation et une influence traumatisante. Les égarements maternels ont des incidences sur les comportements de tous les membres de la famille, mais ils ont surtout des conséquences sur Julien, ses rapports aux autres, sa scolarité, sa vie intime et affective.
Le film veut montrer l'attachement qui unit ces deux êtres, il veut montrer surtout comment une femme peut entraîner son fils dans l'excès, comment elle peut souscrire son enfant à sa propre démesure.

LE HUIS CLOS

Le fait de rester le plus possible dans la maison avec ses occupants accentue le sentiment d'enfermement. Au départ, cela ne découlait pas d'une volonté précise de ma part. Cela s'est imposé naturellement pendant l'écriture. Nous nous sommes rendus compte qu'effectivement, cela renforçait la tension du fil que l'on essayait de tendre. Le choix de la maison a été par la suite une étape importante dans la préparation du tournage du film.


LA MERE

La mère a l'allure sociale d'une femme normale. Pourtant, sa vie de couple est un fiasco. Une éducation bourgeoise, des rêves brisés les ont emprisonnés, elle et son mari, dans un modèle de famille sclérosée. Alors elle compense ses frustrations par un amour débordant pour son fils. Elle redoute plus que tout son départ futur et ne supporte pas de le voir grandir. Elle n'est pas heureuse. Elle est perdue.


JULIEN

Julien est différent des autres enfants. Sa vie, c'est en permanence la loi de sa mère qui s'oppose à la réalisation de ses rêves. Les désirs maternels ont fini par devenir les siens. On devine que, devant les volontés de sa mère, Julien a mis les siennes entre parenthèses. Même quand sa mère est absente, il se limite dans ses contacts aux autres et continue à s'imposer lui-même des interdits. Du coup, quelque chose s'est éteint chez lui, il n'a pas les mêmes désirs que les autres adolescents de son âge. Il s'est construit de telle sorte qu'il n'a plus ces envies. Il dépense une énergie considérable pour plaire à sa mère. A l'école ou au repas d'anniversaire de sa soeur, on sent que Julien s'est coupé du monde. Il est résigné et n'exprime plus sa révolte. Il est passé de l'autre côté.


LES AUTRES

Il y a clairement un passif chez les Marey. Il s'est certainement passé quelque chose de très fort, de dramatique dans l'histoire de cette famille. Mais ce n'est pas le sujet du film. Le constat est que l'un des deux conjoints a perdu le contrôle, le père en l'occurrence est dominé par sa femme. Pourtant, il n'est pas complètement fautif, et la soeur n'est pas totalement lâche. Ils ont simplement laissé ce petit quelque chose
gripper le fonctionnement de leur famille à l'apparence si raisonnable. Leurs petits abandons personnels sont à chaque fois minimes. Accumulés, ils ont provoqué l'enfermement de Julien. Le père, la soeur, la mère, le cercle familial sont seuls responsables de son malaise et de son mal être.


NATHALIE BAYE

J'ai attendu que le scénario soit terminé pour penser à Nathalie, en espérant très fort qu’elle accepte. Elle a très vite dit oui. Elle a eu envie de s'embarquer dans cette histoire bien que consciente des difficultés d'interprétation d'un tel personnage. J'ai voulu travailler avec Nathalie car j'avais d'elle l'image d'une actrice très forte, très engagée dans ses rôles, et j'avais aussi l'image d'un sourire, d'un très beau sourire. Je pensais qu'elle serait certainement très convaincante et assez inattendue dans ce rôle très dur. Je n'ai pas été déçu, j'ai découvert chez elle une vraie violence.
Il est toujours un peu facile de parler d'évidence. Mais cela a bien été le cas avec Nathalie. Travailler avec elle, c'est facile, son désir de comprendre, de transmettre, de restituer au plus juste est concret. Au delà de son talent de jeu, elle cherche en permanence à saisir, à capter, puis à rendre vivant. C’est mon grand apprentissage de cette expérience de travail avec elle. Nathalie, comme certains grands comédiens, est capable de rendre la moindre action extrêmement vivante. Nathalie est une vraie force de vie.


propos recueillis par Magali Montet, Celluloid Dreams

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